jeudi 12 janvier 2017

Le problème avec la réforme du Régime de pension du Canada

(cliquez sur les tableaux pour les agrandir)

Le Régime de pension du Canada (RPC) fait partie du deuxième bloc du système de retraite. C'est l'équivalent du Régime de rentes du Québec (RRQ). Je travaille au Québec? Je cotise au RRQ. Je travaille ailleurs au Canada? Je cotise au RPC. Les prestations sont essentiellement les mêmes. Par contre, en 2016, le RPC coûtait 9,9 % des revenus de travail au lieu de 10,65 % comme au Québec. La différence est due en bonne partie au vieillissement de la population, moins prononcé dans le reste du Canada.

Le prochain tableau montre ce qu'on pouvait recevoir des régimes publics en 2016.

Tableau 12

Trois hypothèses de revenus de travail sont retenues : la moitié du maximum des gains admissibles (MGA) égale à 27 450 $, le MGA égal à 54 900 $ et le MGA augmenté de 50 %, égal à 82 350 $. Le MGA correspond en gros au salaire industriel moyen (SIM).

À 65 ans, une personne a probablement droit à 6 555 $ du RRQ si elle a presque toujours travaillé, si les derniers revenus de travail ont été ont été les meilleurs et s'ils sont de 27 450 $. Additionné avec le PSV de 6 880 $, cela ne remplace que 49 % de ses revenus de travail. Toutefois, si cette personne n'a pas d'autres revenus, elle reçoit le SRG. Au total, ses revenus de pension remplacent 70 % (en vert) de ses revenus de travail. Elle n'a pas besoin de régimes complémentaires ni de REER pour protéger son pouvoir d'achat qui – convenons-en – a toujours été faible et le restera à la retraite.

Le système de retraite n'est pas un outil d'enrichissement, mais il peut parfois améliorer le sort des gagne-petit. Si la personne retraitée a un conjoint et si les revenus du couple ne dépassaient pas 27 450 $ avant la retraite, les régimes publics de base – fédéral et provincial – remplacent entre 85 % et 105 % des revenus perdus, dépendant de l'âge du conjoint plus jeune. Tout en restant très faible, le pouvoir d'achat du couple est amélioré. Nous avons tous connu des parents qui ont mangé de la misère toute leur vie, mais qui ont vécu une retraite relativement agréable grâce aux deux premiers blocs.

On peut affirmer sans se tromper que les personnes qui ont des revenus de travail inférieurs à la moitié du MGA – plus précisément, inférieurs à 30 000 $ – sont correctement protégées par les deux premiers blocs. Elles ne sont pas riches et ne le seront jamais, mais elles conservent ou améliorent leur faible pouvoir d'achat à la retraite. Elles n'ont pas besoin de cotiser à des régimes privés. Heureusement d'ailleurs, puisqu'elles n'ont pas les moyens d'épargner.

Ceux qui ont toujours gagné l'équivalent du SIM reçoivent à 65 ans 36 % de leurs revenus de travail. Avec le SRG, ça monte à 40 % (en jaune) pour les personnes seules et jusqu'à 58 % pour les couples.

Plus vos revenus sont bons, moins vous pouvez compter sur les régimes publics. C'est ce qu'on voit (en rouge) à la dernière colonne.

Pourquoi réformer le RPC?

La PSV est un programme universel dont le fédéral semble vouloir se débarrasser parce qu'il coûte de plus en plus cher avec le vieillissement de la population. Il aimerait le remplacer par le SRG qui est un programme d'assistance. J'ai parlé de sa disparition comme programme universel dans Le problème avec la pension de sécurité de la vieillesse.

La stratégie est simple. D'une part, il augmente le SRG à partir de juillet 2017, d'autre part, il améliore le RPC. En gros, les travailleurs cotiseraient davantage au RPC pour recevoir une rente augmentée qui réduirait la facture du SRG et des allocations. Pour ce qui est de la PSV, il suffit de maintenir le statu quo pour qu'elle disparaisse presque complètement en un siècle. La plupart des provinces semblent d'accord, mais pas le Québec. Il dévoilera ses intentions après avoir flairé le vent en consultant la population.

Les conséquences de la réforme

Le tableau 13 montre les conséquences de cette réforme du RPC. Ce sont des estimations à partir d'informations que j'ai trouvées sur le web.

Tableau 13

Les gains bruts (en vert) semblent de belles améliorations par rapport à maintenant. N’empêche que le fédéral réalise d'importantes économies avec le SRG et les allocations (en rouge). Par ailleurs, les gains bruts sont imposables contrairement aux SRG ou aux allocations. Après impôts, les gains nets seront inférieurs à ceux indiqués (en jaune).

Le tableau 14 donne une bonne idée du résultat final de la réforme.

Tableau 14

Avec la réforme, la pension du RPC serait augmentée de 6 821 $. Cependant, 31 % de cette belle augmentation disparaît dans la perte du SRG. 29 % retourne au fisc. Au bout du compte, le bénéficiaire ne profite que de 2 743 $, soit 40 % du gain initial. C'est comme si le gain de 6 821 $ était imposable à un taux de 60 %... Quant au gagne-petit, il pourrait perdre les trois quarts de son augmentation!

Le gouvernement fédéral dit être conscient du problème. Il prévoit compenser une partie de la perte du SRG avec un crédit remboursable. Ce n'est pas encore clair dans quelle mesure il le fera.

La réforme coûtera des sous. Il faudra contribuer davantage. Les hausses de cotisations seront-elles suffisantes? Les actuaires pensent que oui. Rappelons-nous toutefois qu'en 1966, ils avaient calculé que le RPC et le RRQ devaient coûté 4 % de nos revenus de travail. Aujourd'hui, ces régimes coûtent deux fois et demi plus cher. De quoi se méfier de leurs estimations...


La réforme du RPC vaut-elle la peine? Le gouvernement du Québec pense que non, du moins pour ceux qui perdront une partie de leur SRG. N'oublions pas que le but ultime de l'opération est d'appliquer le principe de l'utilisateur payeur : réduire les dépenses générales en augmentant les charges sociales. On sait qui subira une augmentation de ses charges, mais on ignore qui profitera des réductions de dépenses.

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